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L’écho des luttes politiques des années 1967-1980 dans les chansons engagées

Céline Pruvost

Résumé

Dans la tradition de la chanson engagée, comment raisonnent les "années de plombs" ?
Quel a été l’écho chanté de ces évènements ?
Si certains cantautori très célèbres ont écrit quelques chansons politiques (Francesco Guccini, Fabrizio De Andrè), d’autres artistes ont durablement centré leur production sur ces thématiques (Ivan della Mea, Paolo Pietrangeli, Gualtiero Bertelli, Alfredo Bandelli, Pino Masi, Corrado Sannucci, Fausto Amodei, Enzo Del Re). Dans les années 60 et 70, nombreux de ces auteurs engagés se regroupent d’ailleurs pour former des mouvements dévolus à la chanson politique (Il cantachronache, Il Nuovo Canzoniere Italiano - et ses déclinaisons locales à Pise, Venise, Rome...).
Nous étudierons donc, à travers des exemples précis provenant d’époques diverses (textes écrits "à chaud" ou avec quelques années de recul) les différentes tonalités que prend l’évocation des évènements politiques des années 70 dans les textes des chansons des cantautori : de l’adhésion à la critique, de l’allusion au récit commenté de faits réels.

Texte intégral

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Dans la clameur des années 1967-1980, les chansons ont parfois chanté des slogans, narré des histoires exemplaires, affirmé haut, fort et ensemble – en chœur – des valeurs communes. Au-delà de la question de l’évolution des thématiques soulevées, nous verrons que la forme même de la chanson s’adapte à l’usage qui en est fait. On peut donc analyser en parallèle l’évolution de la société pendant le temps des révoltes et l’évolution de la place qu’y occupe la chanson, ainsi que l’évolution de ses formes.

Nous commencerons par une contextualisation de la période dans l’histoire de la chanson : la fin des années soixante représente un tournant ; pour en saisir les enjeux, il est nécessaire de faire un point rapide sur la chanson d’après-guerre en Italie. Nous analyserons ensuite les thèmes abordés par les chansons politiques à une époque contemporaine aux événements, mais aussi l’évolution de leur rôle et de leur rapport à l’action. Pour finir, nous nous interrogerons sur l’évolution de la chanson engagée juste après la saison des luttes, et sur le contenu des lectures immédiatement rétrospectives qui y sont proposées.

D’un point de vue méthodologique, pour l’objet d’étude spécifique qu’est la chanson, Internet est un recours précieux. Cet article doit beaucoup au site www.ildeposito.org, qui référencie de façon très rigoureuse les chansons politiques italiennes depuis le Risorgimento. Ce site propose gratuitement des textes, des enregistrements[1] ainsi qu’un chansonnier[2], avec des entrées chronologiques et thématiques. Le parti pris consiste à privilégier les matériaux rares, à mettre en ligne des chansons introuvables jusqu’alors. Les cantautori les plus connus et populaires sont donc absents du site. Néanmoins, il est aisé de trouver des enregistrements de leurs chansons sans recourir à un support physique, en passant par exemple par www.youtube.com. Mais l’intérêt des liens proposés dans les notes de bas de page réside essentiellement dans l’écoute des chansons ; les visuels ajoutés par les internautes sont le plus souvent inintéressants et ont même tendance à parasiter l’écoute. Quand plusieurs versions étaient disponibles, c’est celle où le texte était le plus audible qui a été préférée.

Le corpus étant extrêmement vaste, les exemples ont été choisis d’après deux principes : la représentativité et la variété. En effet, certains auteurs ont été tellement productifs qu’à chaque point il aurait été possible de citer une de leurs chansons. Nous avons cherché ici à citer aussi quelques auteurs moins connus, pour donner un aperçu plus large de cette période foisonnante.

Mise en perspective historique :
la chanson d’après-guerre en Italie

L’impact de la guerre sur l’écriture de chansons en France et en Italie est radicalement différent. En France, l’après-guerre est l’âge d’or des chansonniers, chez qui résonnent de forts courants antimilitaristes (Boris Vian) et anarchistes (Léo Ferré, Georges Brassens, Jacques Brel). En Italie, c’est le refoulement qui prévaut, refoulement encadré par une censure systématique. Dans l’immédiat après-guerre, la chanson italienne doit être chansonnette : dès la première édition du festival de San Remo, en 1951, tout ce qui ressemble de près ou de loin à un message politique est systématiquement censuré (certains, comme Luigi Tenco, auront ainsi régulièrement des déboires avec le comité de censure du festival).

L’essor de la chanson politique en Italie est donc plus tardif et s’opère sous l’effet de facteurs aussi bien exogènes qu’endogènes.

Au premier rang des influences internationales, on trouve les chansonniers français, le rock et le folk anglo-saxon. L’importance accordée aux textes, et donc aux messages qu’ils véhiculent, se manifeste à travers les très nombreuses traductions réalisées à cette période : Fabrizio de André traduit et interprète six chansons de Georges Brassens entre 1967 et 1974, Luigi Tenco traduit aussi bien Boris Vian que Bob Dylan (par exemple Blowin’ in the Wind). Il existe d’ailleurs différentes traductions du Déserteur de Boris Vian, qui feront de cette chanson un des modèles (avec les ballades de Bob Dylan) des textes antimilitaristes des années soixante et soixante-dix[3].

Mais la chanson politique se développe aussi en Italie autour de mouvements visant à redécouvrir le répertoire militant des années passées, notamment les chants politiques du Risorgimento et de la Résistance. Ainsi, le projet des Cantachronache (groupe fondé en 1957 à Turin par Fausto Amodei, Sergio Liberovici et Michele Straniero) consiste à la fois à redécouvrir, réarranger et remettre au répertoire des chansons populaires (ce qui implique un important travail de recueil de ces chansons sur le terrain), et à s’en inspirer pour continuer dans cette veine à créer des chansons engagées au présent. À la façon des chansonniers français, en contact avec des intellectuels (comme Jean-Paul Sartre et Jacques Prévert), le groupe des Cantacronache a lui aussi ses intellectuels, parmi lesquels on trouve Umberto Eco et Italo Calvino. Le groupe se dissout en 1963, mais on retrouve certains de ses participants dans le Nuovo Canzoniere Italiano, fondé en 1962 autour d’une revue par Gianni Bosio et Roberto Leydi. Il existe aussi de nombreux groupes régionaux (il Canzoniere pisano, il Canzoniere delle Lame, il Canzoniere di Rimini…) car, souvent, ces chants politiques sont écrits en dialecte : à ceux qui les comprennent de les recueillir et de les transmettre. Au cœur de ces projets, on trouve la recherche d’un lien historique idéal entre la chanson populaire engagée, quelles que soient les luttes et au-delà des époques. La connaissance des chansons écrites pour les luttes passées est considérée comme un terreau fertile pour la composition des chansons des luttes à venir.

Ainsi, la situation reste très cloisonnée pendant les années cinquante et le début des années soixante. D’une part, on trouve ce que les Cantacronache définissent avec dérision comme la canzonetta gastronomica di consumo, dont l’archétype est le festival de San Remo. Ces chansons bénéficient de réseaux de distribution de masse (a fortiori avec l’arrivée de la télévision) et mettent l’accent sur la mélodie (facile à mémoriser), sur l’arrangement (souvent orchestral, avec une débauche d’effets et d’instruments) ainsi que sur la voix et la personnalité de l’interprète. De l’autre, on trouve des groupes de musiciens qui mettent au premier plan le texte et le sens historique des mots, qui ont conscience de s’inscrire dans un patrimoine (qu’ils cherchent à transmettre et à valoriser), tout en accordant assez peu d’importance aux mélodies et aux arrangements – ce qui a pour effet de les rendre très facilement reproductibles. Les accords sont souvent simples, les mélodies couvrent une faible tessiture et servent surtout de support aux textes : pas besoin d’être chanteur pour interpréter la plupart de ces chants populaires. D’ailleurs, ni la personnalité du premier interprète ni le timbre de sa voix ne sont vraiment importants : la chanson doit circuler, passer de tête en tête, de voix en voix. La transmission ne se fait pas par les moyens de diffusion de masse (pour des questions de censure et de non-rentabilité économique) mais par des recueils, des enregistrements et des concerts.

Or, pendant les années soixante, la place de la musique (tout comme celle de la politique) dans la vie de la nouvelle génération change radicalement : la musique se place au cœur de pratiques collectives. À cet égard, un chiffre est significatif : entre 1965 et 1966, la vente de guitares est multipliée par huit ! Les chansons politiques ne sont donc pas seulement destinées à être gravées sur des disques ou chantées lors de concerts : ce sont bien les acteurs mêmes de la vie politique qui souvent les écrivent et les chantent. Ces données nouvelles vont modifier à la fois les thèmes abordés par les chansons et la façon dont elles sont écrites et composées.

Dans l’action politique : thèmes et fonctions de la chanson engagée

Des années soixante aux années soixante-dix, une tendance prévaut à la fois dans les thèmes et dans la façon d’écrire : la radicalisation. Il s’agit d’un crescendo, l’implication idéologique est de plus en plus forte à mesure que les années passent – on trouve néanmoins des thématiques communes à toute la période. Par exemple, l’affirmation de la liberté individuelle est un thème très présent dès le milieu des années soixante, souvent à travers le filtre du conflit générationnel : la liberté doit d’abord se prendre par rapport à la génération des parents. Dans les années soixante-dix, le thème est toujours là, mais à travers des formulations beaucoup plus larges et radicales, par exemple celle de Giorgio Gaber en 1972 dans La libertà :

La libertà non è star sopra un albero,
non è neanche avere un’opinione,
la libertà non è uno spazio libero,
libertà è partecipazione[4].

En outre, la censure est plus forte avant 1968, ce qui explique aussi le fait que certains thèmes soient traités avec une relative prudence. À partir de la seconde moitié des années soixante-dix, l’existence et l’essor des radios libres modifie profondément la donne, ce qui se traduit par une plus grande liberté d’écriture. En effet, les radios libres offrent aux auteurs de chansons la possibilité de diffuser leurs textes et leurs idées sans censure, et vers un public a priori réceptif.

Les principaux thèmes

Certaines chansons politiques affirment une série de valeurs, de fondements théoriques, avec parfois peu de distance vis-à-vis des idées qu’elles exposent. Ce sont justement les chansons qui présentent le moins d’intérêt maintenant, car cette absence de recul critique peut leur donner un caractère naïf. Elles sont néanmoins nombreuses et rendent compte du climat d’effervescence de ces années. Nous en ferons donc un rapide survol thématique[5].

On trouve un nombre considérable de chansons contre la guerre au Vietnam, ou pro-Cuba : internationalisme, guerre froide, on retrouve dans la chanson italienne une forte veine pacifiste ainsi qu’un antimilitarisme très ancré. Nous avons déjà évoqué les échos en Italie des textes antimilitaristes de Boris Vian et de Bob Dylan. De très nombreuses chansons pacifistes partent de ces matrices, par exemple Saigon de Francesco de Gregori[6].

La critique des institutions (la famille, l’école et tout ce qui symbolise l’État ou les hiérarchies ecclésiastiques) est également un filon thématique qui traverse toute la période. Assez tôt, en 1962 – et donc en des termes plutôt modérés, censure oblige –, Luigi Tenco, dans Cara maestra[7], aborde de façon polémique le thème de l’égalité sociale :

Cara maestra,
un giorno m’insegnavi
che a questo mondo noi
noi siamo tutti uguali.
Ma quando entrava in classe il direttore
tu ci facevi alzare tutti in piedi,
e quando entrava in classe il bidello
ci permettevi di restar seduti.

Mio buon curato
dicevi che la chiesa
è la casa dei poveri,
della povera gente.
Però hai rivestito la tua chiesa
di tende d’oro e marmi colorati :
come può adesso un povero che entra
sentirsi come fosse a casa sua ?

Egregio sindaco,
mi hanno detto che un giorno
tu gridavi alla gente
« Vincere o morire ».
Ora vorrei sapere come mai
vinto non hai, eppure non sei morto,
e al posto tuo è morta tanta gente
che non voleva né vincere né morire.

L’École (à travers la maîtresse), l’Église (à travers le curé), l’État (à travers le maire) : dans chaque strophe, le regard ingénu de l’enfant met en évidence un paradoxe et pose la question de la légitimité de toutes ces formes d’autorité. On retrouve d’ailleurs dans la dernière strophe le thème de l’antimilitarisme, traité par une allusion historique au fascisme et à la seconde guerre mondiale.

Cette mise en cause des différentes formes d’autorité a son personnage de prédilection : le vagabond, symbole de liberté absolue. On peut à cet égard remarquer, dans le refrain de Io vagabondo[8] des Nomadi, la rime entre io et Dio : la liberté du vagabond ferait-elle de l’individu libre son propre dieu ? Le vagabond est vu comme un rebelle, un homme libre, capable de s’affranchir des contraintes sociales, d’aller voir par lui-même la réalité telle qu’elle est, sans filtres. Les valeurs morales des humbles sont opposées à la corruption des bourgeois. Dal letame nascono i fiori[9] : à la façon de Georges Brassens, de nombreuses chansons de Fabrizio de André critiquent les bourgeois et idolâtrent quasiment les humbles[10], dans un processus de renversement systématique des valeurs traditionnelles.

Lutte des classes et luttes ouvrières ont donné lieu à de nombreuses chansons, dont certaines sont restées célèbres. C’est le cas de Contessa, de Paolo Pietrangeli, écrite en 1966 et devenue un véritable hymne de la saison des luttes.

« Che roba Contessa all’industria di Aldo
han fatto uno sciopero quei quattro ignoranti
volevano avere i salari aumentati
gridavano, pensi, di essere sfruttati
e quando è arrivata la polizia
quei quattro straccioni han gridato più forte
di sangue han sporcato il cortile e le porte
chissà quanto tempo ci vorrà per pulire. »

Compagni dai campi e dalle officine
prendete la falce portate il martello
scendete giù in piazza picchiate con quello
scendete giù in piazza affossate il sistema.

Voi gente per bene che pace cercate
la pace per far quello che voi volete
ma se questo è il prezzo vogliamo la guerra
vogliamo vedervi finir sotto terra
ma se questo è il prezzo l’abbiamo pagato
nessuno più al mondo deve essere sfruttato.

« Sapesse Contessa che cosa m’ha detto
un caro parente dell’occupazione
che quella gentaglia rinchiusa là dentro
di libero amore facea professione.
Del resto mia cara di che si stupisce
anche l’operaio vuole il figlio dottore
e pensi che ambiente che può venir fuori
non c’è più morale, Contessa. »

Se il vento fischiava ora fischia più forte
le idee di rivolta non sono mai morte
se c’è chi lo afferma non state a sentire
è uno che vuole soltanto tradire
se c’è chi lo afferma sputategli addosso
la bandiera rossa gettato ha in un fosso.

Voi gente per bene che pace cercate
la pace per far quello che voi volete
ma se questo è il prezzo vogliamo la guerra
vogliamo vedervi finir sotto terra
ma se questo è il prezzo l’abbiamo pagato
nessuno più al mondo deve essere sfruttato.

Ma se questo è il prezzo l’abbiamo pagato
nessuno più al mondo deve essere sfruttato.

Plus qu’un thème, la lutte des classes est ici illustrée dans la structure même de la chanson, cela devient un principe d’écriture. Couplets et refrains opposent deux points de vue, chacun emblématiques d’une classe. Ces points de vue se croisent sans se convaincre : est-ce à dire que les classes seraient hermétiquement séparées ? Deux mondes s’opposent : dans les couplets, un monde feutré, où le dialogue est châtié voire précieux (sapesse, facea), où les protagonistes sont peu nombreux (un dialogue, un titre, le prénom « Aldo »), et fort méprisants (le champ lexical du mépris est très fourni). Dans les refrains, en écho, on trouve la rage sourde et puissante des masses (compagne e compagni, noi, voi : c’est alors le pluriel qui domine) et l’artillerie lourde des symboles (à commencer par la faucille et le marteau). Notons d’ailleurs que la fin de la chanson n’est pas spécialement antimilitariste… La force des masses semble beaucoup plus puissante que les certitudes archaïques des patrons coupés de la réalité. Au-delà de sa structure textuelle, dans la composition de cette chanson et dans les arrangements de la première version enregistrée, on retrouve des principes semblables. Si la mélodie des couplets s’apparente presque à du parlé-chanté et est interprétée par une seule voix, dans les refrains, les nombreux contre-chants donnent une idée de la puissance et du nombre des ouvriers, qui scandent une mélodie beaucoup plus rythmée et convaincante.

Le féminisme est proportionnellement et qualitativement sous-représenté dans la production de l’époque. Très peu de chansons y renvoient explicitement. Le Movimento femminista romano a édité des recueils de Canti delle donne in lotta, intéressants pour voir la façon dont ces thèmes ont été traités, mais gardons à l’esprit que ces chansons n’ont souvent eu qu’une diffusion locale. Par exemple, Storia di una moglie mancata[11] décrit les schémas familiaux contre lesquels les jeunes femmes luttent. C’est donc une chanson entièrement basée sur l’antiphrase, qui met en évidence le poids de l’éducation dans la place qu’occupent les femmes dans la société.

La chiamarono Angelina
ed era una bambina…
Giocava con la lavatrice
imparava a fare… la nutrice.
Fra bambole culle e bambolotti
fra pentole cucine e cucinotti
Il babbo la mamma nonno e nonna
ne stavano facendo una donna…
« Tu sarai una dolce mamma,
tu sarai una moglie ubbidiente »,
le diceva il padre sempre,
le diceva il nonno sovente…

Remarquons qu’il existe aussi des chansons de droite. Cette étude est focalisée sur les chants politiques de gauche, car cela correspond à la sensibilité de la plupart des auteurs célèbres. Néanmoins, des cantautori comme Leo Valeriano (qui, en 1966, dédie à Mussolini sa Ballata dell’illusione) ou Massimo Morsello (surnommé le De Gregori nero) se produisent (par exemple à l’occasion du Campo Hobbit de l977 à Benevento), écrivent et ont aussi leur public. Mais à l’évidence, la question du révisionnisme pose ici problème : certaines chansons se situent nettement du côté de la réécriture de l’histoire (il existe par exemple de nombreuses chansons glorifiant la république sociale de Salò).

Pour finir, le thème de la violence, et plus spécifiquement du terrorisme, a fait l’objet de différents traitements, de la chronique des faits aux propositions d’hypothèses et d’analyses. En 1976, la chanson Agosto[12] de Claudio Lolli fait explicitement référence, dès son titre, à la strage dell’Italicus[13]. On y trouve une description des moments les plus pénibles et représentatifs de l’explosion (la fumée, l’odeur âcre). Mais au-delà du récit du drame, Lolli introduit dans la chanson politique l’idée de strage di stato et établit un lien entre l’attentat de l’Italicus et celui de la Piazza Fontana, à l’époque où cette thèse était encore loin d’être reconnue officiellement :

Si muore ancora di guerra
Non certo d’amore
Si muore di bombe
Si muore di stragi
Più o meno di stato.

Non ci vuole molto a capire
che è stata una strage,
non ci vuole molto a capire che niente,
niente è cambiato
da quel quarto piano in questura[14],
da quella finestra.
Un treno è saltato.

En 1973, Fabrizio de André propose une explication du recours au terrorisme, dans le concept-album Storia di un impiegato. Il condamne fermement l’utilisation individuelle de la violence à travers l’histoire d’un homme en retard, qui n’a pas participé aux mouvements de 1968 et pense pouvoir rattraper le temps perdu en faisant un choix plus radical et aussi complètement individuel ; l’expérience tourne au grotesque ; l’homme finit en prison, où il apprendra les vraies valeurs de la collectivité, du groupe. Sous forme de parabole, cet album propose une satire crue du terrorisme, dénoncé comme une dégénérescence individualiste, une trahison des idées collectives.

Les fonctions

Après ce panorama thématique, nous allons maintenant nous interroger sur les différents types de fonction des chansons politiques.

Il convient avant tout de ne jamais perdre de vue leur dimension ludique, festive et pédagogique, qui reste fortement liée à leur dimension sociale. Former un chœur, aller dans les rues : il s’agit, au sens propre, de faire entendre une voix collective. Chanter ensemble, c’est se faire entendre, transmettre un message sur un mode ludique. Cette pratique de la chanson n’est pas celle de spectateurs, mais d’acteurs – au sens où ceux qui chantent agissent et ne sont pas confortablement assis dans une salle de spectacle. Le succès des chansons politiques ne peut d’ailleurs pas se quantifier en termes de nombre de disques vendus, comme c’est le cas pour la canzone di consumo. Leur popularité n’est mesurable qu’au nombre de personnes qui les connaissent et les chantent ensemble dans les manifestations – ainsi qu’à la trace qu’elles laissent dans les mémoires.

La chanson-dénonciation n’hésite pas à avoir recours au pathos, notamment lorsqu’il s’agit de décrire la condition ouvrière. Dans O cara moglie[15], d’Ivan della Mea (1969), un mari annonce à sa femme qu’il s’est fait licencier pour avoir participé à une manifestation (on retrouve le thème de la condition ouvrière, confrontée à des traitements injustes et discriminants). La dimension pédagogique est ici très présente, à travers un retournement de situation : le père commence par envoyer son enfant se coucher pour le protéger de la dure réalité. Puis, après avoir raconté les faits, il convoque de nouveau son fils pour lui transmettre une histoire dont il n’a pas à avoir honte. Le cheminement de cet homme se voudrait exemplaire dans la prise de conscience de la classe ouvrière : ne pas avoir honte de sa condition, mais dénoncer les injustices subies et se battre pour y remédier.

Les chansons-slogans ou chansons-hymnes font le récit de faits qui ainsi deviennent exemplaires. Souvent inspirées par des faits réels, elles seront ensuite chantées lors d’autres événements similaires. L’aspect cyclique est au cœur du principe d’écriture, au sens où le fait exemplaire devient une sorte de paradigme. Certaines, comme Contessa, partent d’un récit librement adapté du réel, qui deviendra ensuite exemplaire. D’autres décrivent un événement très précis (nous l’avons vu par exemple dans le traitement du thème du terrorisme), qui va à son tour servir de modèle et se charger d’une valeur beaucoup plus générale que l’événement particulier dont elles partent. C’est le cas par exemple d’une autre chanson de Paolo Pietrangeli, Valle Giulia[16] (écrite en 1969, en référence à la battaglia di Valle Giulia du 1er mars 1968) :

Piazza di Spagna, splendida giornata,
traffico fermo, la città ingorgata
e quanta gente, quanta che n’era !
Cartelli in alto e tutti si gridava :
« No alla scuola dei padroni !
Via il governo, dimissioni ! »

E mi guardavi tu con occhi stanchi,
mentre eravamo ancora lì davanti,
ma se i sorrisi tuoi sembravan spenti
c’erano cose certo più importanti.
« No alla scuola dei padroni !
Via il governo, dimissioni ! »

Les références au fait réel sont nombreuses : on trouve notamment des éléments de description du lieu (et ce dès le titre), des faits, l’atmosphère effervescente. Les idées pour lesquelles se battent les protagonistes de la chanson, rappelées sous la forme du slogan, seront reprises par ceux qui la chanteront ensuite. Ces textes s’inspirent donc de voix collectives et sont faits pour être chantés collectivement. À cet égard, il est très intéressant de remarquer que dans les enregistrements en studio, deux artifices techniques sont fréquemment utilisés pour matérialiser cette épaisseur collective : le contre-chant et la bande son. Les versions originales de Valle Giulia et de Contessa[17] ont abondamment recours au contre-chant dès que la parole est militante : il s’agit de matérialiser le nombre et la multiplicité des voix. L’utilisation des bandes son est un autre moyen fréquemment utilisé pour atteindre le même objectif, parfois de façon un peu artificielle. On peut donner l’exemple de Primo d’agosto Mestre ’68, où Gualtiero Bertelli chante de façon très peu dynamique, avec un accompagnement à la guitare extrêmement sobre : l’énergie vient de la bande son, présente en fond sonore pendant toute la chanson, qui matérialise les sons typiques d’une manifestation. Un procédé semblable est utilisé dans O cara moglie, d’Ivan della Mea (voir note 15). On constate donc un rapport de réciprocité : si certaines chansons deviennent la bande son des manifestations (au sens où elles sont chantées systématiquement à cette occasion), les manifestations peuvent aussi, au sens propre, servir de bande son aux chansons.

L’écriture, la composition et l’arrangement des chansons militantes s’adaptent donc à leurs lieux d’exécution : pas tant les salles de concert que la rue. De manière générale, on constate d’ailleurs un déplacement des lieux où se situe l’action des chansons, parallèle au changement du centre de gravité de la vie sociale : de l’intérieur à l’extérieur, de la maison à la place. Le titre Piazza bella piazza (1976) de Claudio Lolli résume bien la centralité de ce lieu dans la vie sociale des militants. Dans C’è solo la strada (1974), Giorgio Gaber anticipe quelque peu le retour à la maison qui caractérisera la fin de la saison des luttes, en rappelant que la rue est au cœur de l’identité militante :

Bisogna ritornare nella strada
nella strada per conoscere chi siamo
[...]
in casa ti allontani dalla vita, dalla lotta,
dal dolore e dalle bombe[18].

L’affirmation identitaire est une autre des principales fonctions des chansons engagées : il s’agit d’affirmer l’unité d’un noi contre un voi, ce qui recouvre à la fois la lutte des classes et la rupture générationnelle. Dans la Canzone del Maggio[19] (chanson librement adaptée par Fabrizio De André à partir de Chacun de vous est concerné[20], écrite à propos des événements de mai 1968 en France par Dominique Grange[21]), on trouve une des formulations les plus fermes de cette bipartion entre le noi et le voi – « anche se il nostro maggio ha fatto a meno del vostro coraggio » –, qui débouche sur une affirmation de la force du noi, lequel, par son nombre et sa conviction, englobe le voi récalcitrant : « anche se vi crediate assolti siete lo stesso coinvolti ». Même quand le thème de l’identité de groupe et de la rupture générationnelle n’est pas au centre d’une chanson, il constitue souvent une toile de fond, un présupposé de base : souvent, une rapide étude de l’énonciation permet de constater la récurrence de cette bipartition, de cette opposition entre « nous » et « eux ». Comme nous le verrons, plus la fin de la saison des révoltes s’approche, plus un autre pronom s’affirme : io.

Juste après : critiques et regards rétrospectifs

À la fin des années soixante, dans la période d’effervescence où l’on entonne les principaux hymnes de la période, les voix critiques passant par des chansons sont extrêmement rares. On peut néanmoins citer Tre passi avanti[22], dans laquelle, en 1967, Adriano Celentano – qui appartient bien plus au monde de la canzonetta gastronomica di consumo qu’à celui de la chanson politique – caricature et critique les pratiques de la jeunesse beat, jusqu’à augurer d’une fin rapide du mouvement :

Caro Beat
mi piaci tanto,
[...]
Pero’ se i ragazzi
che non si lavano,
quelli che scappano di casa,
e altri che si drogano
e dimenticano Dio
fanno parte del tuo mondo.
O cambi nome.
O presto finirai.

Ce qui advient dès le milieu des années soixante-dix est d’une tout autre nature : il ne s’agit plus de critiques extérieures, mais d’un questionnement qui émane des cantautori eux-mêmes et donne lieu, à la fin de la décennie, à une véritable polémique sur le rôle de la chanson engagée, qu’on peut interpréter comme le signe d’une crise interne au genre. Ainsi, dès 1977, Bruno Lauzi, dans Io canteropolitico[23], évoque avec amertume l’essoufflement des pratiques associées au militantisme :

Io canterò politico
quando starete zitti
e tutti i vostri slogans
saranno ormai sconfitti,
quando sarete stanchi
di starvene nel coro
a battere le mani
solo se lo voglion loro.
Avrete bisogno
dell’individualismo
per vincere la noia
di un assurdo conformismo.

Ce qui est provocateur en 1977 – présenter le repli individualiste comme une nécessité face à la perte de sens des mobilisations collectives – correspond à ce qui se produit effectivement dans les années quatre-vingt.

De fait, le climat se tend, et d’aucuns reprochent à des cantautori célèbres de s’enrichir grâce à leurs chansons politiques. Suite à une attaque de cette nature, Francesco Guccini chante en concert L’avvelenata[24], qu’il inclura en 1976 dans son disque Via Paolo Fabbri 43, et qui est une réponse à cette polémique :

Voi critici, voi personaggi austeri, militanti severi, chiedo scusa a vossìa,
però non ho mai detto che a canzoni si fan rivoluzioni, si possa far poesia ;
io canto quando posso, come posso, quando ne ho voglia senza applausi fischi :
vendere o no non passa fra i miei rischi, non comprate i miei dischi e sputatemi
addosso…

Si l’auteur se défend d’écrire pour vendre, il relativise aussi au passage la portée des chansons politiques : il ne s’agit pas de faire la révolution, il ne s’agit pas de modifier le réel. On est bien loin de l’enthousiasme de dix ans plus tôt.

Le système qui gravite autour des chansons politiques est mis en cause dans certains textes, comme Sono solo canzonette[25], qu’Edoardo Benato chante en 1980 sur une musique très enjouée et légère :

Io di risposte non ne ho !
Io faccio solo rock’n’ roll !
Se ti conviene bene
io più di tanto non posso fare !

Gli impresari di partito
mi hanno fatto un altro invito
e hanno detto che finisce male
se non vado pure io
al raduno generale
della grande festa nazionale !
Hanno detto che non posso
rifiutarmi proprio adesso
che anche a loro devo il mio successo,
che son pazzo ed incosciente
sono un irriconoscente
un sovversivo, un mezzo criminale !
[…]
Però a quelli in malafede
sempre a caccia delle streghe
dico : no ! Non è una cosa seria !
E così e se vi pare
ma lasciatemi sfogare,
non mettetemi alle strette,
e con quanto fiato ho in gola
vi urlerò : non c’è paura !
Ma che politica, che cultura,
sono solo canzonette !

La grande festa nazionale, c’est la Festa dell’Unità de Bologne, qui semble être devenue un passage obligé : Benato dénonce ainsi l’instrumentalisation des chansons politiques par les partis. Tout comme Guccini, il utilise le texte d’une chanson pour minorer la portée des chansons politiques sur le réel. Dès la fin des années soixante-dix, le rôle des chansons militantes, leur portée et leur statut sont donc questionnés, en premier lieu par ceux qui les écrivent.

Sur le plan du contenu, les lectures rétrospectives et les autocritiques sont de plus en plus fréquentes. Dans I reducci, Giorgio Gaber, en 1977, utilise le pronon noi pour dresser le bilan d’une génération qui, selon lui, a déjà échoué :

E allora ci siamo sentiti insicuri e stravolti
come reduci laceri e stanchi, come inutili eroi,
con le bende perdute per strada e le fasce sui volti,
già a vent’anni siam qui a raccontare ai nipoti che noi
noi buttavamo tutto in aria
e c’era un senso di vittoria
come se tenesse conto del coraggio
la storia.

Quand vient l’heure du bilan, dès 1981, il sera encore plus sévère et désabusé : dans Anni affollati[26], Gaber décrit le temps des révoltes avec une grande amertume :

Anni affollati di idiomi, di idioti
di guerrieri e di pazzi, anni di esercizi.
Anni affollati di arroganza e di stucchevole bontà
di tentativi disperati
anni affollati di qualsiasi forma di incapacità.
Anni affollati, per fortuna siete già passati.

Les bilans rétrospectifs se multiplient donc dans les chansons engagées, avant même le riflusso des années quatre-vingt. Ainsi l’année 1978 est-elle à la fois celle de Cuba[27] d’Eugenio Finardi et d’Eskimo de Francesco Guccini. Finardi parle au présent du riflusso, et propose même une explication de ses causes :

È forse vero che a Cuba non c’è il paradiso
che non vorremmo essere in Cina a coltivare riso
che sempre più spesso ci si trova a dubitare
se in questi anni non abbiamo fatto altro che sognare.
È che viviamo in un momento di riflusso
e ci sembra che ci stia cadendo il mondo addosso
che tutto quel cantare sul cambiar la situazione
non sia stato che un sogno o un’illusione.
[...]
E se in questi anni tanti sogni son sfumati,
in compenso tanti altri li abbiamo realizzati.
C’è chi silenziosamente si è infiltrato dentro al gioco
e ogni giorno lentamente lo modifica di un poco.
Ed è normale che ci si sia rotti i coglioni
di passare la vita in dibattiti e riunioni
e che invece si cerchi di trovare
nella pratica un sistema per lottare.

Changement significatif dans l’énonciation, le noi ne s’oppose plus à un voi, le texte est au contraire centré sur le bilan de l’expérience d’une génération. Dans Eskimo[28], Guccini personnifie même davantage son discours et utilise la première et la deuxième personne du singulier pour décrire l’évolution d’un couple entre les années soixante et les années soixante-dix. Bien que la focalisation ne soit pas la même, il s’agit là encore d’analyser un processus qui est implicitement considéré comme révolu au moment de l’écriture – d’ailleurs l’essentiel du texte est écrit à l’imparfait et au passé simple. En 1978, les cantautori, quel que soit le ton (nostalgique, explicatif ou critique) écrivent de plus en plus sur le mode du bilan rétrospectif. Beaucoup de textes sont voués à expliquer ou justifier des phénomènes qui sont considérés comme révolus, tout en relativisant le rôle de la chanson politique. D’une chanson d’action (dans les années soixante), on passe à une chanson d’analyse et de bilan, dès la fin des années soixante-dix.

Conclusion

Dans l’effervescence des années soixante, la modification de la place de la musique dans les pratiques sociales a donné lieu a une abondante production de chansons militantes. Antimilitarisme, critique des institutions, analyse des rapports de classe et des luttes ouvrières, féminisme, terrorisme : autant de phénomènes et de thématiques qui ont trouvé un écho chanté. Les chansons politiques ont alors eu des fonctions variées, allant de l’hymne au slogan chanté, de la chanson identitaire à la chanson de dénonciation.

Dans le courant des années soixante-dix, on assiste à un essoufflement du genre, les remises en cause et les critiques se multiplient : le riflusso a aussi été celui de la chanson engagée. Ce qui montre bien que la production de ces chansons allait de pair avec des pratiques sociales : elles étaient faites pour être écoutées, certes, mais surtout pour être chantées, pendant des manifestations ou autour d’une guitare. Dès lors que les pratiques changent, quand il n’y a plus grand monde pour les chanter avec joie dans des rassemblements populaires, on range les guitares et le répertoire s’adapte : il n’y a plus lieu de composer de nouveau hymnes ; tout au plus peut-on analyser les raisons de la défaite, ce qui donne lieu à des chansons de plus en plus analytiques.

Néanmoins, l’idée de constitution d’un répertoire populaire de chansons des luttes politiques à travers les époques n’est pas morte. La tradition du chansonnier se perpétue avec les nouveaux moyens de communication. Ainsi, la démarche proposée par le site www.ildeposito.org s’inscrit dans la continuité du projet des Cantacronache et du Nuovo canzoniere italiano : les chansons du « temps des révoltes » se sont ajoutées à ce patrimoine.


[1] De nombreux enregistrements de chansons difficiles à trouver sont disponibles sur cette page : http://www.ildeposito.org/archivio/elenchi.php?cat=audio [tous les sites mentionnés dans cet article ont été consultés le 7 septembre 2009].

[2] Pour télécharger le chansonnier, aller sur cette page : http://www.ildeposito.org/archivio/canzoniere/index.php

[3] Par exemple, la version de Francesco Gualerzi : http://www.youtube.com/watch?v=1luxwXtGrH4&feature=related ; ou celle de de Gino
Paoli : http://www.youtube.com/watch?v=tU65q_H8vPQ

[4La libertà, http://www.youtube.com/watch?v=p1Y4xjh0rC0&

[5] Pour des développements sur les aspects thématiques des chansons politiques des années soixante et soixante-dix, les travaux de Stefano Pivato sont très intéressants : La storia leggera. L’uso pubblico della storia nella canzone italiana, Bologne, Il Mulino, 2002 et Bella Ciao. Canto e politica nella storia d’Italia, Rome, Bari, GLF Editori Laterza, 2005.

[6Saigon, http://www.youtube.com/watch?v=eTgXxjjbCYg

[7Cara maestra, http://www.youtube.com/watch?v=lres9f2HMls

[8Io vagabondo, http://www.youtube.com/watch?v=g2WfZ-OgRNQ

[9Via del campo, Fabrizio de André. Voir cette superbe version en concert, réarrangée : http://www.youtube.com/watch?v=5TN0td-Z8jc

[10] Tendance que certains ont d’ailleurs tournée en dérision, par exemple Ettore Scola, qui montre dans Brutti sporchi e cattivi (1976) que l’indigence ne rime pas nécessairement avec la grandeur d’âme.

[11Canti delle donne in lotta n°2, Rome, I Dischi Dello Zodi, 1975.

[12Agosto, http://www.youtube.com/watch?v=z4WMp99WHgc

[13] Attentat perpétré le 4 août 1974 à San Benedetto (province de Bologne), dans le train express l’Italicus et qui fit 12 morts et 44 blessés. Il fut revendiqué par le groupe néofasciste Ordine Nero (Ordre Noir).

[14] « Quel quarto piano in questura », c’est celui d’où tombe, le 15 décembre 1969, l’anarchiste Giuseppe Pinelli, du bureau du commissaire Calabresi.

[15O cara moglie, enregistrement : http://www.youtube.com/watch?v=N5c7yMfSDZs ; O cara moglie, texte : http://www.ildeposito.org/archivio/canti/canto.php?id=86

[16] Version récente (juste guitare et voix) : http://www.youtube.com/watch?v=w7oFUqQm1p4. La version originale est beaucoup plus dynamique : plusieurs voix, tempo plus rapide, énergie radicalement différente : http://www.youtube.com/watch?v=ZTn_fwb4ZGQ

[17] Voir http://www.youtube.com/watch?v=zmdKDf5tjjI. Cette version de Contessa chantée par un Pietrangeli plus tout jeune est à cet égard édifiante : même si on est très loin des beaux chœurs de la version originale, sur les refrains il semble indispensable qu’il y ait au moins deux voix !

[18C’è solo la strada, http://www.youtube.com/watch?v=_9Mfg_N5uew

[19La canzone del maggio, http://www.youtube.com/watch?v=LVyM8i5mUAM

[20Chacun de vous est concerné, http://www.youtube.com/watch?v=YrBQqMO7-pI

[21] On retrouve là une autre manifestation de l’influence de la production française sur la chanson italienne, même si ce cas précis diffère beaucoup de ce qui peut se produire avec Georges Brassens ou Boris Vian : ici, Fabrizio De André ne se contente pas de traduire ou d’adapter une chanson en gardant à l’identique la musique et l’arrangement. Au contraire, il va considérablement améliorer la chanson de départ, dont il ne garde que le thème principal et quelques tournures intéressantes, pour y ajouter une véritable mélodie et une véritable structure narrative.

[22Tre passi avanti, http://www.youtube.com/watch?v=tMiMkJYKf-k

[23Io canterò politico : http://www.youtube.com/watch?v=GauZBMNAO_o

[24L’avvelenata : www.youtube.com/watch?v=nzTtz_0dX0k&feature=PlayList&p=B94CAED5E63F9A89&playnext=1&playnext_from=PL&index=21

[25Sono solo canzonette : http://www.youtube.com/watch?v=JBS48R2i6Pw&feature=PlayList&p=A1450B987D3C9F62&playnext=1&playnext_from=PL&index=12

[26Anni affollati (la chanson commence après 1 minute 20 d’introduction instrumentale) :
http://www.youtube.com/watch?v=PT_pFfpuZ2o&feature=PlayList&p=24A4CA3AF7625D76&playnext=1&playnext_from=PL&index=41

[27Cuba (avec, au début, un fragment d’interview intéressant dans lequel on perçoit la tension PCI/gauche) : http://www.youtube.com/watch?v=Z5-CDDpDQsc

[28Eskimo : http://www.youtube.com/watch?v=KV8F20_R8lY


Citer cet article :

Céline Pruvost, « L’écho des luttes politiques des années 1967-1980 dans les chansons engagées », colloque Littérature et "temps des révoltes" (Italie, 1967-1980), 27, 28 et 29 novembre 2009, Lyon, ENS LSH, 2009, http://colloque-temps-revoltes.ens-lsh.fr/spip.php?article149